La taverne était déserte, encore une folle nuit avec l'équipage du « Mouvant ». Un équipage de pirate fort sympathique. Ralf était assis à la même table, avec trois d'entre eux. Le quatrième était quelque part sous une table, ou avec une fille de joie dans une chambre.
Ralf était un habitué de cette taverne. Ancien pirate, il vivait maintenant de ses rentes et de la pêche. Il aimait donné des conseilles aux jeunes loups de mer, et leur raconter des histoires. Bien qu'il les racontait comme s'il les avait vécu, personne n'était dupe. C'était juste pour donner une touche de réalisme à ses légendes, que les jeunes, s'ils survivaient, raconteraient à leur tour. Une tradition orale, les pirates formaient presque un autre peuple, très différent.
Il sa racla la gorge, inonda son gosier d'une bonne lampée de rhum et tendit sa pipe à l'un des pirates pour qu'il la bourre.
Bon les gars, j'vais vous raconter c'qui nous est arrivé une fois, avec le « Lune Noire ». Ouai, c'est ca, mon ancien bateau, la ou j'ai fait comme vous, avant d'prendre ma r'traite ici. On barroudait un peu partout, a la recherche d'or, d'argent, de joyaux et de jolies filles prêtes a offrir leur corps pour la nuit aux héros qu'on était. On avait mis l'pied sur un p'tit îlot à la con, y'avait une grotte, et un cimetière d'épaves, vestige d'une grande réunion pirate ayant mal tournée. C'était chiant a visiter, mais on chopait toujours un p'tit truc marrant qui s'refourguait une fortune.
On a foutu les barques à la flotte, et on a visité l'île. Elle était déserte, aussi vide que vos crânes d'œufs. Y'avait des ruines d'une sorte de temple d'un dieu bizarre, et on a trouver un coffre de pierre. Aussi lourd que mon entrejambe si vous voyiez c'que j'veux dire. Autrement dit, on s'est mis à quatre pour le porter sur la plage. On a prévu le cap'taine Rorg Albiron, j'vous en ai déjà parler, celui qu'a fait péter un mec accroché à un tonneau de poudre parcequ'il aavit dit que sa mère ressemblait à un poulpe malade.
On a posé le camp'ment sur la plage, et on a fait sauter le couvercle. Et la, vous allez pas m'croire, y'avait des tas de pièces d'or ! J'vous jure, on s'y attendait pas. Ca a été la fête, et le partage. On a bu plus que d'habitude, on pouvait vider les réserve, avec c't'or, on pourrait partir pendant plusieurs mois sans voir le rhum descendre.
La nuit était belle, y'avait un beau croissant de lune, f'sait ni trop chaud, ni trop froid. Il devait être pas loin de minuit, et le vent s'est levé. On a tous arretés de boire quand on a vu le coffre qui tremblait comme un garde royale devant des gars comme vous. Il tremblait tellement qu'j'ai cru qu'il allait exploser. Y'a des sortes de nuages bleus qu'ont commencés à sortir du coffre, prenant la direction d'la mer et du cim'tière d'épaves. Putain, j'ai flipper comme jamais. Le vent soufflait de plus en plus fort, et on a entendu des craqu'ments.
Avant d'continuer, parceque c'qui s'est passé est vraiment bizarre, j'vais vous dire qu'il faut toujours écouter les anciens. C'est nous qui det'nons la vérité. J'ai p't'etre une jambe, un bras et un œil en moins, mais j'peux vous foutre sur la tête a vous trois en même temps sans qu'vous m'touchiez. Alors ecoutez bien, et vous d'viendrais comme moi.
Y'a un bateau tout pourrit, avec des voiles déchirées, et pas d'lumière qu'a apparut. Y'avait des formes dessus, mais on savait pas trop quoi faire. Ce truc a tiré sur la plage. On a flippés, notre bateau pouvait pas riposter, on était tous sur la plage.
On a courru sur cette foutue île comme si on avait le diable au cul ! et c'est pas loin d'être la vérité. Le bateau mort a continué a tirer sur nous, même dans la forêt qu'on a traverse. On s'est planqué dans le temple, on a sortit nos armes, et on a attendu.
C'est des tas d'os qui nous ont sautés à la gueule. Plein d'squelettes qui bougeaient comme vous et moi. On s'est battu, mais tu leur coupais la tête, et ces cons continuaient à se battre. J'me suis même fait mordre, regardez c'te cicatrice sur ma jambe valide. Et y'avait que son crâne, le reste du corps était en petit tas et un peu partout dans la salle.
Ca servait a rien d'rester ici, on allait s'faire crever comme ces rats de gardes royaux si on restait la. Alors on a chargé, et on s'est à nouveau barrés, vers le centre de l'île. Le bateau continuait à tirer, et il visait bien ce con ! Putain, j'me souviens avoir vu un de nos jeunes gars le prendre sur la tête, restait plus qu'un tas de boue rouge après. Les squelette nous coursaient encore, mais les plus lents d'entre nous restait en arrière pour leur couperune jambe ou deux, ca m'fait marrer maint'nant, z'avez l'air con a ramper après nous après.
Ca a duré toute la nuit. Au p'tit matin, on est retourné sur la plage, le coffre avait disparus, et l'or avec. On avait une vingtaine de blessés et de morts. On est remontés dans l'bateau, et on a filés en vitesse.
On a voulut y retourner une fois, avec plus de gars avec nous, et prêt a couler ce satané bateau, mais vous allez jamais me croire, on l'a jamais retrouvée.
Ralf observait tour a tour les jeunôts qui l'avaient écoutés en silence. Ils connaissaient la légende, celle de l'esprit des morts qui protegaient leur trésor contre les vivants.
Vous savez c'que ca veut dire ? Même s'il est mort, tu voles pas la bourse à un pirate, parcequ'il va te courser jusqu'en enfer pour la récuperer…
Accueil